La Cour de cassation vient de valider et donc de permettre aux employeurs de signer une rupture conventionnelle avec un salarié dont le contrat de travail est suspendu du fait d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. Seuls une fraude ou un vice du consentement établis par le salarié sont susceptibles d’invalider cette rupture.
C’est par l’arrêt du 30 septembre 2014, n° 13-16297 que cette rupture est désormais possible : le salarié, victime d’un accident du travail le 27 janvier 2009, avait été arrêté jusqu’au 8 février 2009. Il avait ensuite repris le travail, sans avoir passé de visite médicale de reprise, puis signé une rupture conventionnelle le 7 juillet 2009, homologuée par le DIRECCTE le 10 août 2009. Le salarié a saisi les juges en demandant la nullité de cette rupture. Il s’appuyait sur la règle suivante pour justifier sa demande d’annulation : lorsque la visite de reprise n’est pas organisée, le contrat de travail reste suspendu. L’employeur ne peut donc le rompre que s’il justifie soit d’une faute grave du salarié, soit de l’impossibilité où il se trouve, pour un motif non lié à l’accident, de maintenir ce contrat (c. trav. art. L. 1226-9 ; cass. soc. 28 février 2006, n° 05-41555). Cette argumentation n’a pas convaincu les juges.
Rupture conventionnelle signée alors que le contrat de travail est suspendu : quand est-elle valable ?
Il est possible de conclure une rupture conventionnelle pendant une période de suspension du contrat de travail lorsque cette suspension ne relève d’aucune protection particulière (ex. : congé parental d’éducation, congé sabbatique, congé sans solde) (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009), à condition que le consentement du salarié soit libre et éclairé (cass. soc. 30 septembre 2013, n° 12-19711 D).
La question est tout autre lorsque, comme dans cette affaire, le salarié bénéficie d’une protection particulière pendant que son contrat de travail est suspendu.
Le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle bénéficie d’une protection particulière lorsque son contrat de travail est suspendu. C’est d’ailleurs sur le fondement de cette interdiction légale de licencier que, dans cette affaire, le salarié avait contesté la rupture conventionnelle. Pour autant, la Cour de cassation vient de juger qu’une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de suspension consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Elle écarte néanmoins les cas de fraude ou de vice du consentement prouvés pas le salarié. Mais en l’espèce, le salarié n’avait invoqué ni l’un ni l’autre. La rupture conventionnelle était donc valable. La Cour ouvre ainsi la porte là où l’administration avait en son temps retenu une position inverse (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009), de même que certaines cours d’appel (CA Orléans 1er octobre 2013, n° 12/02133 ; CA Poitiers 6 novembre 2013, n° 12/00772).
La conclusion d’une rupture conventionnelle n’est donc pas incompatible avec la législation protectrice des salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
Mais attention, en cas de suspension pour maternité ou inaptitude : le doute persiste…car la Cour de cassation n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer.
Pour le salarié inapte
Pour l’administration, une rupture conventionnelle ne peut pas être signée car l’employeur a une obligation de reclassement du salarié (circ. DGT 2008-11 du 22 juillet 2008). C’est aussi la solution retenue par une cour d’appel qui a considéré qu’il y avait fraude dans le recours à une rupture conventionnelle (CA Poitiers 28 mars 2012, n° 10/02441).
En revanche, la Cour de cassation a récemment admis qu’une rupture conventionnelle puisse être conclue avec un salarié déclaré apte avec réserves suite à un accident du travail, sauf fraude ou vice du consentement (cass. soc. 28 mai 2014, n° 12-28082). Soulignons que dans ce cas de figure, l’employeur est uniquement soumis à une obligation de réintégration dans l’emploi d’origine ou un emploi similaire et non à une obligation de reclassement.
Le cas de la Maternité
La seconde situation particulière pendant laquelle la rupture du contrat de travail est encadrée concerne la salariée enceinte, en congé de maternité ou de retour de ce congé depuis moins de 4 semaines. À l’heure actuelle, il convient, d’être très prudent, sans décision claire de la Cour de cassation, étant donné que :
– durant le congé de maternité en lui-même, l’administration considère qu’aucune rupture conventionnelle ne peut être conclue (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009) ;
– hors période de congé de maternité, le ministère du Travail admet qu’une rupture conventionnelle puisse être envisagée, tout en précisant qu’une rupture motivée par la maternité serait abusive…
– pendant la période de protection des 4 semaines qui suivent la fin du congé de maternité, une cour d’appel a admis la validité d’une rupture conventionnelle signée et homologuée au retour du congé de maternité de la salariée (CA Lyon 6 novembre 2013, n° 11/08266).
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